IRL
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Louis et Yve
Jeunesse des Ans Chantés
Depuis qu'il était tout petit, Yve avait conscience qu'il ne ferait pas long feu.Lui, que l'on jugeait plus pragmatique qu'empathique, plus scientifique qu'émotif, avait nourri ce pressentiment dès l'âge de cinq ans. Peut-être était-ce dû à la surprotection de sa famille vis-à-vis de lui, peut-être que tous les soucis de santé qui s'étaient alignés depuis son premier séjour à l'hôpital avaient encouragé cette prédilection. Ou bien, il avait préféré se faire une raison, plutôt que d'espérer un jour marcher sans aide. Dans tous les cas, il s'était préparé très tôt à ce que son existence ne soit qu'une succession de déceptions ; un combat permanent entre son corps fragile et lui. Malgré tout, il s'était fait à cette jambe blessée, et ce qui le frustrait n'était pas tant sa dégénérescence, mais plutôt le manque d'accessibilité dans la société. Magique, comme humaine.
Pour autant, alors qu'il se doutait que son état ne s'améliorait pas, il encaissa difficilement la dernière nouvelle. De l'extérieur, le jeune homme avait à peine haussé un sourcil. Un vague soupir — blasé — était ce que le médecin lui avait tiré de son annonce. Yve faisait de l'arthrose à vingt ans. Le médecin avait tenté d'égayer la nouvelle avec des promesses, à jurer que l'avancée de la science pourrait l'aider, et que peut-être faudrait-il envisager une prothèse... et que s'il se mettait au sport, et que s'il faisait simplement plus attention à sa santé, et que si...
Et que si...
Et si...
Et si ses parents n'avaient pas méprisé autant la médecine humaine, Yve n'en serait probablement pas là aujourd'hui.
Du reste, l'étudiant se ferma un peu, sans réellement faire part de ce qu'il ressentait profondément. Il se contenta d'enrouler ses doigts au pommeau de sa canne, tout en se perdant dans ses pensées. Aux suggestions du médecin, il répondait des « je verrais », tout en réfléchissant à ce qui restait de son avenir. Moralement, il tenait le coup.
En apparence.
Si Yve était résilient, cette annonce qui en soit n'était pas si grave, il mit plusieurs jours à la digérer. Comme à chaque fois qu'Yve ressentait une émotion désagréable, il préférait se jeter tout entier dans ses études et ses intérêts spécifiques. Pourtant, cette fois-ci, même ses sujets de prédilections ne suffisaient pas à le sortir de sa déprime. Dès qu'il se mettait à rêvasser, l'annonce revenait et tournait en boucle, charriant des vagues et des vagues de frustrations. Et de désespoir.
Plusieurs fois, le jeune homme s'était demandé comment il allait en parler à ses parents et ses frères. Il n'avait pas envie d'être continuellement traité en créature fragile, en manque d'autonomie. Non. Il souhaitait garder sa liberté, si durement gagné au fil des années. Il détestait les inquiéter, être entouré de plein de bonnes intentions, tandis qu'on lui rappellerait de continuellement faire attention. Que sa vie ne serait pas celle d'un garçon de vingt ans.
Puis, Yve avait réagi comme il réagissait d'habitude face à un problème. De façon pragmatique et méthodique. Il s'était demandé si changer sa canne ne serait pas une meilleure solution. Après tout, il l'avait depuis un moment, et tenir tout son poids d'un côté lui faisait mal dans l'omoplate. Il s'était lancé dans plusieurs plans, à tracer encore et encore des prototypes sur des feuilles. Des plans, dignes d'un meuble Ikea qu'il ne saurait pas monter seul. Des améliorations pour l'aider à marcher, avec tout un tas de trucs farfelus en plus. Une béquille unique mêlant le savoir fait humain et sorcier. Il avait repris son esprit d'inventeur ; c'était ainsi qu'il encaissait la chose.
Au fond, il ruminait toujours.
Puis un beau jour, Yve profita d'une courte journée de cours pour se déplacer jusqu'à la Grand'Place. S'il se pensait plus intelligent que la plupart des gens, il admettait qu'il avait besoin de l'aide d'un professionnel pour sa béquille. Pour un garçon aussi fier, c'était douloureux.
D'autant plus que la dernière fois où il était venu ici, il n'avait pas été seul. Yve s'appuya sur sa canne, il poussa un profond soupir, en levant la tête sur l'enseigne. Deux ans. Deux ans depuis que Mina et Jean-Pierre l'avaient quitté. Son amie adorait cet endroit, à la fois pour l'énergie qui s'en dégageait, mais aussi pour son patron. Plusieurs fois, elle l'avait sauvé des interrogations interminables d'Yve à propos de la magie africaine, ou encore s'il était possible de cloner les baguettes - quel intérêt ? Franchement ? Et pourquoi pas, tout simplement ?
Le jeune homme enfonça sa tête dans son écharpe. Habillé de couleur neutre, il était difficile de dire si les années l'embellissaient ou l'enlaidissaient. La vérité était que contrairement aux autres garçons de son âge, Yve ne grandissait pas.
Il vieillissait.
Il avait un air éteint, les yeux cernés et le visage plus émacié encore qu'avant. S'il avait pris quelques centimètres, sa silhouette est plus cassée qu'avant. Abîmé, c'était le mot qui le définissait le mieux. Usé par ses études ; il avait perdu du poids, et bien malgré toute sa volonté pour ne pas être pris de haut, il était frêle.
Un autre soupir, avant de prendre son courage à deux mains. Yve poussa la porte de la boutique de la main gauche, puis il entra en faisant claquer sa canne sur le seuil. Il se présenta à Louis, fantôme d'une jeunesse révolue et passée à regarder celleux qu'il aimait sans jamais rien faire. Il força un sourire, et il lâcha :
« Bonjour. »
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Louis Dhossou
Jeunesse des Ans Chantés
Yve & Louis
Parfois, Louis se réveillait avec la jambe raide - et puis ça passait. Parfois, il avait l’étrange impression qu’il devait boiter pour avancer - et puis ça passait.
Ce sont des impressions succinctes, éphémères,
qu’il oublie tout aussi rapidement qu’elles ne viennent.
Comme des papillons qui passent devant son regard.
La boutique de Louis est - comme toujours - en fouillis. Remplie de bibelots et rangée à la fois, dans cet étrange capharnaüm dans lequel seul le maître de maison peut se retrouver. Il y a des sculptures, des fétiches, des brisures de bois et une odeur forte de sciure et de brûlé. Et au milieu de cet étrange bazar : Louis, bien debout et campé sur ses deux jambes, contrairement à ce que ces souvenirs d’un autre monde pourraient laisser croire. L’endroit pourrait paraître étrange, incongru au milieu de cette Bruxelles magique. Comme si la porte menait à un autre monde - mais non. C’est bel et bien le même.
Ce n’est que le reflet d’une culture qui n’a ici jamais vraiment eu sa place, et que l’on a cherché à détruire durant bien des années.
Louis adore sa boutique, aussi incongrue peut-être paraître. Plus que l’héritage d’une famille, c’est également le travail d’une vie : la sienne. Parce que cette boutique - contrairement à celle de Paris - est bel et bien partie de rien. Tout à faire, tout à construire. Un chantier. Et le voilà désormais, et depuis deux dizaines d’années, enfin correctement installé.
“Bonjour.”
La clochette au-dessus de la porte tinte doucement.
Il redresse les yeux, jusque là posés sur une vitrine qu’il réarrangeait.
Et toi, enfant plus tant enfant désormais puisque te voilà presqu’adulte. Il te reconnaît facilement - et bien malgré lui grâce à la canne qui te soutient, car ce serait bien mentir que de dire qu’il n’en a cure. Voilà des années qu’il ne t’avait vu par ici.
“Bonjour Yve.”
Réflexe qu’il a, que de poser les yeux autour de toi, à presqu’attendre que la porte ne s’ouvre de nouveau sur une figure féminine qu’il voyait constamment en ta présence. Mais rien ne vient, et le silence perce finalement.
“Marina n’est pas avec toi ? … Ou Maria ?”
Il continue d'espérer un court instant, que la porte de ne s’ouvre de nouveau. Mais rien. Alors tant pis.
“Voilà un moment que je ne t’avais pas vu ici. Comment vas-tu ? En quoi puis-je t’aider ?”
Ce sont des impressions succinctes, éphémères,
qu’il oublie tout aussi rapidement qu’elles ne viennent.
Comme des papillons qui passent devant son regard.
La boutique de Louis est - comme toujours - en fouillis. Remplie de bibelots et rangée à la fois, dans cet étrange capharnaüm dans lequel seul le maître de maison peut se retrouver. Il y a des sculptures, des fétiches, des brisures de bois et une odeur forte de sciure et de brûlé. Et au milieu de cet étrange bazar : Louis, bien debout et campé sur ses deux jambes, contrairement à ce que ces souvenirs d’un autre monde pourraient laisser croire. L’endroit pourrait paraître étrange, incongru au milieu de cette Bruxelles magique. Comme si la porte menait à un autre monde - mais non. C’est bel et bien le même.
Ce n’est que le reflet d’une culture qui n’a ici jamais vraiment eu sa place, et que l’on a cherché à détruire durant bien des années.
Louis adore sa boutique, aussi incongrue peut-être paraître. Plus que l’héritage d’une famille, c’est également le travail d’une vie : la sienne. Parce que cette boutique - contrairement à celle de Paris - est bel et bien partie de rien. Tout à faire, tout à construire. Un chantier. Et le voilà désormais, et depuis deux dizaines d’années, enfin correctement installé.
“Bonjour.”
La clochette au-dessus de la porte tinte doucement.
Il redresse les yeux, jusque là posés sur une vitrine qu’il réarrangeait.
Et toi, enfant plus tant enfant désormais puisque te voilà presqu’adulte. Il te reconnaît facilement - et bien malgré lui grâce à la canne qui te soutient, car ce serait bien mentir que de dire qu’il n’en a cure. Voilà des années qu’il ne t’avait vu par ici.
“Bonjour Yve.”
Réflexe qu’il a, que de poser les yeux autour de toi, à presqu’attendre que la porte ne s’ouvre de nouveau sur une figure féminine qu’il voyait constamment en ta présence. Mais rien ne vient, et le silence perce finalement.
“Marina n’est pas avec toi ? … Ou Maria ?”
Il continue d'espérer un court instant, que la porte de ne s’ouvre de nouveau. Mais rien. Alors tant pis.
“Voilà un moment que je ne t’avais pas vu ici. Comment vas-tu ? En quoi puis-je t’aider ?”
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Louis et Yve
Jeunesse des Ans Chantés
Lentement, Yve releva les yeux sur l'homme lui faisant face. Ah, bon sang, il avait oublié ce détail. Louis était grand, il faisait largement une tête de plus que lui. Un corps massif, une voix toujours posée, qui lui faisaient sentir combien il était fragile en comparaison. Plus jeune, le garçon avait espéré que cette telle différence allait diminuer. Et même si Yve était loin d'être petit, sa silhouette tassée ne jouait pas en sa faveur. Il n'imposait que son air chétif, sa mauvaise humeur et le parfum désagréable de son Axe.Le regard sur sa canne, comme pour s'assurer qu'il s'agissait bien lui. Une extension de sa personnalité, qui depuis longtemps, ne le touchait plus trop. C'était ainsi. Puis, il y avait eu la suite.
Quelque part, Yve avait redouté la question. Il l'avait anticipé, tout en espérant que Louis ne la poserait pas. Voilà pourtant que le vieux cherchait le nom ; un vide dans la boutique. Il manquait sa silhouette, et ses boucles noires, son teint de miel et la vivacité de ses remarques. Yve inspira, avant de retenir un soupir. Puis il haussa les épaules.
Un raclement de gorge.
« Mina, vous voulez dire, Monsieur Dhossu ? Mh... On n'est plus... mh... ami·es, depuis deux ans. »
Yve glissa une main dans sa poche, avant de laisser la porte se refermer définitivement derrière lui. De son point de vue, Louis n'avait pas bien changé depuis la dernière fois. Peut-être qu'il était un tantinet plus ridé au coin des yeux, mais il conservait sa force tranquille, sa prestance.
Son moral n'en fut que plus impacté, et Yve n'en montra rien. Il était bon pour dissimuler ce qu'il ressentait vraiment. Et puis, son mauvais caractère était un excellent répulsif. Ici, seulement, son ton était plus doux, ses sourires plus présents.
« Je vais bien, lâcha-t-il d'un rictus éteint. Et vous ? Comment vont votre femme et votre fils ? »
Et il se rendait compte, plus les secondes s'allongeaient entre les phrases, qu'il ne souhaitait pas parler de sa venue ici. Si soudaine. Après ces deux ans, passés dans une complète solitude ; entre la poussière et ses recherches, entre ses rêves et ses ruminations. Yve examina la boutique, un regard à gauche, puis à droite. Il reconnaissait le bordel organisé des esprits vifs et passionnés ; il était doté du même.
« Euh... eh bien. »
C'était rare de percevoir de l'hésitation dans sa voix, c'était rare de le voir pris aux dépourvus. Surtout quand il s'agissait de ses propres décisions. Un instant, Yve fixa le sol, et il pensa tristement, ce qu'il ne dit pas : mon état dépérit. Quand il redressa la tête vers Louis, ce fut pour répondre :
« Je me demandais si je pouvais passer une commande particulière ? J'ai des plans, et du temps ? Oh. Bien sûr, votre prix sera le mien. »
Un autre sourire, qui creusait ses fossettes, et qu'il forçait toujours un peu. Un regard franc au demeurant, même si Yve se dévissait le cou pour étudier les expressions de Louis.
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Louis Dhossou
Jeunesse des Ans Chantés
Yve & Louis
"Mina, vous voulez dire, Monsieur Dhossu ? Mh... On n'est plus... mh... ami·es, depuis deux ans."
"Oh. Je vois… Tu m'en vois navré."
Car il est vrai que Louis avait toujours apprécié - ces petites grivoiseries, et rien ne s'arrangeait avec l'âge avançant. Louis, du haut de ses plus de quarante ans et de ses presque vingt ans de mariage, avait toujours eu une tendresse particulière pour les jeunes couples. Comme s'il revoyait en vous, ne serait-ce qu'un peu, le jeune couple qu'il formait alors avec Isabella.
Du moins, c'est ce qu'il pensait.
Et il n'imagine pas se fourvoyer.
Et la porte définitivement se ferme. C'est donc terminé. La fin d'une relation lui serre toujours la poitrine. Et quelque chose de ton regard l'empêche de lancer l'un de ses vieux adages - une de perdue, dix de retrouver. Phrase terrible s'il en est.
"Je vais bien."
On ne dirait pas. Mais Louis se tait.
"Et vous ? Comment vont votre femme et votre fils ?"
"Oh ils vont bien, ils vont bien. Nathan est à l'école et Isabelle… dans le monde non-mag'."
Il se racle la gorge. Sa relation avec son fils n'avait jamais été aussi mauvaise, mais il n'en dit rien. Le silence qui suit cette question, en revanche, en dit bien plus que le reste.
"En quoi puis-je t'aider ?"
"Euh… eh bien. Je me demandais si je pouvais passer une commande particulière ? J'ai des plans, et du temps ? Oh. Bien sûr, votre prix sera le mien."
"Bien sûr. Dis-moi, de quoi s'agit-il ?"
Louis se vantait sans crainte de pouvoir tout faire et tout enchanter, dès lors que l'on touchait à sa matière fétiche : le bois. C'était là son fond de commerce, bien plus élargi que ce que pouvait proposer à Paris son paternel et sa sœur.
"Une nouvelle baguette peut-être ? Les miennes ne conviennent pas à tout le monde, tu sauras... Ou un balai ? Je peux t'en faire un sur-mesure sans vraiment de problème. Ou un bureau d'étude ? J'en ai qui peuvent s'adapter à ta façon de travailler et à ta posture pour t'assurer les meilleurs résultats."
Il a une confiance totale dans ses produits, Louis.
Peut-être même un peu trop, il faut avouer.
"Oh. Je vois… Tu m'en vois navré."
Car il est vrai que Louis avait toujours apprécié - ces petites grivoiseries, et rien ne s'arrangeait avec l'âge avançant. Louis, du haut de ses plus de quarante ans et de ses presque vingt ans de mariage, avait toujours eu une tendresse particulière pour les jeunes couples. Comme s'il revoyait en vous, ne serait-ce qu'un peu, le jeune couple qu'il formait alors avec Isabella.
Du moins, c'est ce qu'il pensait.
Et il n'imagine pas se fourvoyer.
Et la porte définitivement se ferme. C'est donc terminé. La fin d'une relation lui serre toujours la poitrine. Et quelque chose de ton regard l'empêche de lancer l'un de ses vieux adages - une de perdue, dix de retrouver. Phrase terrible s'il en est.
"Je vais bien."
On ne dirait pas. Mais Louis se tait.
"Et vous ? Comment vont votre femme et votre fils ?"
"Oh ils vont bien, ils vont bien. Nathan est à l'école et Isabelle… dans le monde non-mag'."
Il se racle la gorge. Sa relation avec son fils n'avait jamais été aussi mauvaise, mais il n'en dit rien. Le silence qui suit cette question, en revanche, en dit bien plus que le reste.
"En quoi puis-je t'aider ?"
"Euh… eh bien. Je me demandais si je pouvais passer une commande particulière ? J'ai des plans, et du temps ? Oh. Bien sûr, votre prix sera le mien."
"Bien sûr. Dis-moi, de quoi s'agit-il ?"
Louis se vantait sans crainte de pouvoir tout faire et tout enchanter, dès lors que l'on touchait à sa matière fétiche : le bois. C'était là son fond de commerce, bien plus élargi que ce que pouvait proposer à Paris son paternel et sa sœur.
"Une nouvelle baguette peut-être ? Les miennes ne conviennent pas à tout le monde, tu sauras... Ou un balai ? Je peux t'en faire un sur-mesure sans vraiment de problème. Ou un bureau d'étude ? J'en ai qui peuvent s'adapter à ta façon de travailler et à ta posture pour t'assurer les meilleurs résultats."
Il a une confiance totale dans ses produits, Louis.
Peut-être même un peu trop, il faut avouer.
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Louis et Yve
Jeunesse des Ans Chantés
Dire « je vais bien », c'était une forme de promesse chez Yve. Il ferait attention à ne pas trop se surmener. De son point de vue, ça allait ; il ressentait la fatigue et la douleur, mais cela lui était devenu coutumier. Parfois, c'était plus intense. Et ce n'était pas le cas aujourd'hui. Aujourd'hui, c'était simplement son moral qui était frêle. Pourtant, le garçon essayait de tenir à distance les élans sombres de son âme. Il pensait bien, férocement, que sa santé empirait, et que c'était sans espoir. Mais c'était tellement plus simple d'enfouir, loin, très loin, les sentiments négatifs plutôt que d'y faire face.« Tant mieux, lâcha Yve au sujet de la famille de Louis C'est vrai que votre femme est au courant. »
Un faible sourire au coin de ses lèvres minces, avant de laisser son esprit embrayer sur autre chose. Il ne se doutait pas un seul instant que la relation de Louis avec son fils n'était pas des meilleures, il ne s'attarda pas au raclement de gorge qui aurait dû être un indice.
De toute façon, Louis était passé à autre chose. Il essayait de deviner ce qu'Yve était venu chercher auprès de lui. La passion s'exprimait dans sa voix calme, et le jeune homme se laissa sourire en attendant. Il pesait le pour et le contre, peu assuré de devoir faire face à sa demande. Ce serait admettre à haute voix qu'il était physiquement diminué. Sa fierté en prenait un coup, néanmoins, il était porté par la soif de nouveauté. Le travail de Louis l'intéressait, car il sortait de ce qu'il connaissait. Si Mina ne lui avait pas répété plusieurs fois de ménager le commerçant, Yve l'aurait probablement harcelé avec toutes les questions qui lui passaient dans la tête.
« Ah non... je n'ai jamais été intéressé par ces trucs-là, lâcha Yve en écartant d'un geste de la main l'idée qu'il puisse un jour monter sur un balai - au-delà de son handicap, il avait vite le tournis. Ni un bureau, sa posture allait très bien : tordue, à force de se tenir mal, une épaule plus haute pour éviter d'appuyer sur sa jambe blessée. Et pour la baguette... Ah non, sa curiosité avait été piquée au même instant. Yve recommençait à se poser des questions, comment ça pas pour tout le monde ? Et... Il se racla la gorge pour réprimer sa curiosité, avant d'annoncer : Non. Une canne... Enfin... une béquille plutôt. Comme s'il était rétrogradé. Et enchanté, vous savez, comme celle-ci. Yve lâcha sa canne, qui resta droite. Quand il bougea, elle revint à lui. C'était pour éviter de tomber qu'il l'avait ensorcelé. Et avec une ouverture. Il dévissa son pommeau ; il n'y avait pas de fond, et cela lui permettait de stocker tout ce qu'il voulait. Il remit le tout en place. Ce n'est pas pressé, j'ai déjà une idée de ce que je veux. Bien évidemment qu'il avait tout préparé, afin de correspondre au mieux à ses envies et ses besoins. De plus, il voulait un petit bijou de technomagie, quelque chose qui pourrait laisser une marque dans l'esprit des sorciers. Il rêvait. Articulée, même, précisa le jeune homme en laissant tomber son sac. Vous savez pour qu'elle puisse se plier et déplier. Avant d'ouvrir son sac, il s'arrêta avant d'ajouter : évidemment, si le projet vous intéresse ? »
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Louis Dhossou
Jeunesse des Ans Chantés
Yve & Louis
“Ah non... je n'ai jamais été intéressé par ces trucs-là. Ni un bureau. Et pour la baguette…”
Un instant, Louis hausse un sourcil, conscient d’avoir piqué ton intérêt - si ce n’est ta curiosité. Il est un maître baguettier, c’est sa formation initiale bien qu’il ait choisi d’étendre son fond de commerce. Et il est on ne peut plus sérieux, lorsqu’il dit que ses baguettes ne conviennent à toutes les mains - mélange des techniques de fabrication occidentales et des traditions africaines, elles peinent effectivement à trouver un public à conquérir.
Mais Louis se dit - qu’il peut tout aussi bien essayer.
“Non. Une canne... Enfin... une béquille plutôt. Et enchanté, vous savez, comme celle-ci.”
Il observe avec un intérêt non feint la manière dont ta canne est enchantée, capable de tenir droite seule, et de venir te récupérer lorsque tu t’en éloignais. De la belle magie, à son sens.
“Et avec une ouverture.”
“Je vois.”
Il s’approche de ta canne pour en voir l’intérieur, tout en se frottant la barbe. Articulée, précises-tu en conclusion tout en te penchant. Déjà, bien au-delà de l’aspect matériel de la chose, Louis se surprenait - pas vraiment en vérité - à réfléchir à la manière de concevoir un tel objet. C’était bien évidemment dans ses capacités.
“Evidemment, si le projet vous intéresse ?”
“Oh bien sûr ! Ma foi, j’aurai besoin de prendre quelques mesures, et également de quelques indications supplémentaires… Les matériaux, outre le bois évidemment ? Je n’utilise que des essences africaines, tu sauras. On pourra ajouter un cuir ou un tissu rembourré pour rendre plus confortable la poignée ou la repose.”
Les termes exacts, Louis ne les connaît pas et pour cause : il n’est pas médecin. Néanmoins, il voit exactement ce dont il parle.
“Ou si tu souhaites adopter une forme ou un motif particulier ? Certains se plaisent à mettre des motifs floraux ou animaliers au bout de leur canne ou de leur baguette.”
Il hausse les épaules : ce n’est pas vraiment son dada.
Rien que sa baguette fait dans la sobriété - naturelle.
D’un geste, il fait venir à lui son mètre ruban, qu’il utilise habituellement pour les prises de mesure préalable à la vente d’une baguette. Il note ta taille, de quelle côté tu tiens ta canne, la hauteur de tes hanches, celle de ton poignet et de ton coude. Le ruban s’agite seul, sans que Louis n’ait besoin ni de le tenir, ni de s’approcher.
“Pour les sortilèges, nous sommes d’accord : charme de maintien, d’autonomie et d’extension ? Ça en fait trois.”
Il les a comptés en levant les doigts depuis l’auriculaire.
Un instant, Louis hausse un sourcil, conscient d’avoir piqué ton intérêt - si ce n’est ta curiosité. Il est un maître baguettier, c’est sa formation initiale bien qu’il ait choisi d’étendre son fond de commerce. Et il est on ne peut plus sérieux, lorsqu’il dit que ses baguettes ne conviennent à toutes les mains - mélange des techniques de fabrication occidentales et des traditions africaines, elles peinent effectivement à trouver un public à conquérir.
Mais Louis se dit - qu’il peut tout aussi bien essayer.
“Non. Une canne... Enfin... une béquille plutôt. Et enchanté, vous savez, comme celle-ci.”
Il observe avec un intérêt non feint la manière dont ta canne est enchantée, capable de tenir droite seule, et de venir te récupérer lorsque tu t’en éloignais. De la belle magie, à son sens.
“Et avec une ouverture.”
“Je vois.”
Il s’approche de ta canne pour en voir l’intérieur, tout en se frottant la barbe. Articulée, précises-tu en conclusion tout en te penchant. Déjà, bien au-delà de l’aspect matériel de la chose, Louis se surprenait - pas vraiment en vérité - à réfléchir à la manière de concevoir un tel objet. C’était bien évidemment dans ses capacités.
“Evidemment, si le projet vous intéresse ?”
“Oh bien sûr ! Ma foi, j’aurai besoin de prendre quelques mesures, et également de quelques indications supplémentaires… Les matériaux, outre le bois évidemment ? Je n’utilise que des essences africaines, tu sauras. On pourra ajouter un cuir ou un tissu rembourré pour rendre plus confortable la poignée ou la repose.”
Les termes exacts, Louis ne les connaît pas et pour cause : il n’est pas médecin. Néanmoins, il voit exactement ce dont il parle.
“Ou si tu souhaites adopter une forme ou un motif particulier ? Certains se plaisent à mettre des motifs floraux ou animaliers au bout de leur canne ou de leur baguette.”
Il hausse les épaules : ce n’est pas vraiment son dada.
Rien que sa baguette fait dans la sobriété - naturelle.
D’un geste, il fait venir à lui son mètre ruban, qu’il utilise habituellement pour les prises de mesure préalable à la vente d’une baguette. Il note ta taille, de quelle côté tu tiens ta canne, la hauteur de tes hanches, celle de ton poignet et de ton coude. Le ruban s’agite seul, sans que Louis n’ait besoin ni de le tenir, ni de s’approcher.
“Pour les sortilèges, nous sommes d’accord : charme de maintien, d’autonomie et d’extension ? Ça en fait trois.”
Il les a comptés en levant les doigts depuis l’auriculaire.
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Louis et Yve
Jeunesse des Ans Chantés
Yve regarda distraitement les rubans qui s'agitaient dans tous les sens, sans oser dire qu'il avait déjà pris des mesures. Il écouta Louis, hochant parfois la tête. Puis il attrapa l'un des plans qu'il avait conçus. Il les tendit à l'artisan. C'était des parchemins enroulés sur eux-mêmes, remplis de dessins assez détaillés de ce qu'il cherchait. Des annotations recouvraient le papier, avec des remarques, parfois des questions. Si les dessins étaient plutôt compréhensibles, méthodiques et précis, ce n'était pas le cas de son écriture. Yve s'était pourtant appliqué. Mélange de flamants, suivis de remarques en français, tracé d'une écriture qui avait perdu en beauté au fil du temps. Il avait recopié ses brouillons, mais la fatigue s'était sentie au bout d'un moment. Cela se voyait dans les arabesques de certaines lettres, dans les angles trop prononcés des consonnes. Son écriture était désuète, à son image ; similaire à celle d'un médecin qui ne terminait pas ses mots.Il y avait plusieurs modèles, avec à chaque fois des ajustements. Ce qu'il pensait être le mieux pour lui, à la fois sur le plan médical et sur le confort. Du reste, Yve n'avait rien précisé sur la beauté de l'objet en lui-même. Comme pour son apparence, il se fichait bien de ces détails. Il se contenta de répondre :
« Quatre, en vérité, Yve sourit en fixant Louis. Il s'appuyait sur sa canne, à devoir lever le cou en direction de l'artisan. Il faut qu'elle soit liée à moi, et qu'elle puisse toujours me revenir. »
Yve ne précisa pas la raison. Il n'était simplement pas à l'abri d'une mauvaise plaisanterie. Quelques camarades le cherchaient constamment, et Yve dans son adorable caractère (non), répondait avec autant d'aplomb qu'un lion. Malgré sa frêle silhouette et sa hanche.
Quant à la canne, elle avait été personnalisée par ses soins au fil des années et de ses besoins. Elle venait du monde des humains, cela se voyait dans sa sobriété. Il avait passé de longues soirées à la modifier, mais maintenant, elle ne lui conviendrait plus. C'était comme abandonner un vieux vêtement devenu inconfortable, mais qui ne lui correspondait plus.
« Je ne suis pas très motif, Monsieur Dhossu, avoua Yve en haussant les épaules. Vous pouvez voir ce “lien”, comme celui que j'aurais avec ma baguette, par exemple. Concernant le bois, quelque chose de solide, capable de soutenir mon poids. Je vous fais confiance là-dessus. De toute façon, Yve faisait partie de la catégorie des poids plumes. Il était à peu près sûr que Mina aurait été capable de le soulever. Probablement que Lizzie en était aussi capable. Il se racla la gorge. Et il faut que cela reste ajustable. »
Yve joua de son pouce, comme une manière de dire qu'à force, il commençait à avoir des douleurs dans le poignet.
« Je ne sais pas si vous avez déjà vu ce que faisaient les no-mags de ce côté-là, reprit-il avec un ton plus passionné. Moins éteint. C'est plutôt fascinant. »
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Louis Dhossou
Jeunesse des Ans Chantés
Yve & Louis
“Quatre, en vérité.”
“Quatre…”
Louis s’est dors et déjà saisi des plans et autres schémas faits de tes mains, annotés çà-et-là de français et d’un flamand qu’il n’a jamais réussi à comprendre - autre que pour les formules de base. Il hausse un sourcil, concentré sur ton écriture de mouche et sur la traduction des quelques mots qu’il parvient à décrypter.
Force est de constater que ça ne mène à rien.
Il demandera à sa compagne, et c’est ainsi.
“Il faut qu'elle soit liée à moi, et qu'elle puisse toujours me revenir.”
Il hoche simplement la tête, ajoutant des notes à son carnet après consultation de tes plans. Puis il les replie, avant de se concentrer de nouveau sur toi. Il glisse un regard sur ta canne.
“Je ne suis pas très motif, Monsieur Dhossu.”
“Tant mieux : moi non plus.”
“Vous pouvez voir ce “lien”, comme celui que j'aurais avec ma baguette, par exemple. Concernant le bois, quelque chose de solide, capable de soutenir mon poids. Je vous fais confiance là-dessus. Et il faut que cela reste ajustable.”
“Bien sûr. Puis-je garder tes schémas ? Ils seront d’une grande aide.”
Il observe sans gêne ton poignet tordu, comme pour ajuster dans son esprit les annotations qu’il a déjà prises - pour redresser ton poignet, ton bras, ton dos et le reste de ton corps. Qui sait si ce sera agréable à court terme, mais à long terme le but est là : te permettre de ne pas développer une scoliose précoce.
“Je ne sais pas si vous avez déjà vu ce que faisaient les no-mags de ce côté-là. C'est plutôt fascinant.”
“Oh, les non-mag’ sont plein de bonnes idées, à n’en point douter. J’avoue que je m’intéresse quelque peu à leurs mécanismes de montres ou d’horlogerie. La précision dans leurs machines est fascinante, et redoutable. Savais-tu que certains artisans se spécialisent dans les montres tout en bois ?”
Il pourrait en parler des heures durant, tant il trouve ces objets tout bonnement fascinants. Malheureusement, l’heure n’est pas à l’extase.
“Laisse-moi te montrer quelque chose.”
Il part un instant dans la partie baguette de sa boutique - quelques baguettes en exposition, d’autres sous boîtes triangulaires, pas un nombre aussi incroyable que dans une boutique uniquement spécialisée dans les baguettes, mais tout de même un petit stock tout à fait respectable. Il se saisit d’une boîte : bois de ficus reflexa, corne d’Éruptif pour quelques 25.4cm.
Il revient vers toi, comme pour te la présenter.
“En vérité, Yve, il n’y a pas vraiment de sortilège qui permet de faire le lien entre une baguette et son sorcier : c’est un lien qui se crée instantanément après leur rencontre, et il n’est ni infini, ni indélébile. Il peut faiblir, voire se briser. Les baguettes sont des objets magiques capricieux.”
Comme pour te le prouver, il se saisit de cette baguette qui n’est pas la sienne - quand bien même il l’a sculptée. A son contact, elle se met à crachoter une fumée noirâtre et à émettre un bruit de pétard en fin de vie. Il la repose dans son socle et referme la boîte.
“C’est un processus qui se fait tout au long de la fabrication de l’objet, et qui s’accentue lorsqu’on lui offre ses caractéristiques. J’ignore si je pourrais reproduire parfaitement ceci avec ta béquille - elle n’a pas pour vocation de se comporter comme une baguette, ni d’avoir la même fonction.”
Il va ranger cette baguette à sa place initiale.
“Néanmoins, je peux essayer. Le mieux serait que je puisse jeter un œil sur ta baguette, afin de reproduire les mêmes caractéristiques.”
“Quatre…”
Louis s’est dors et déjà saisi des plans et autres schémas faits de tes mains, annotés çà-et-là de français et d’un flamand qu’il n’a jamais réussi à comprendre - autre que pour les formules de base. Il hausse un sourcil, concentré sur ton écriture de mouche et sur la traduction des quelques mots qu’il parvient à décrypter.
Force est de constater que ça ne mène à rien.
Il demandera à sa compagne, et c’est ainsi.
“Il faut qu'elle soit liée à moi, et qu'elle puisse toujours me revenir.”
Il hoche simplement la tête, ajoutant des notes à son carnet après consultation de tes plans. Puis il les replie, avant de se concentrer de nouveau sur toi. Il glisse un regard sur ta canne.
“Je ne suis pas très motif, Monsieur Dhossu.”
“Tant mieux : moi non plus.”
“Vous pouvez voir ce “lien”, comme celui que j'aurais avec ma baguette, par exemple. Concernant le bois, quelque chose de solide, capable de soutenir mon poids. Je vous fais confiance là-dessus. Et il faut que cela reste ajustable.”
“Bien sûr. Puis-je garder tes schémas ? Ils seront d’une grande aide.”
Il observe sans gêne ton poignet tordu, comme pour ajuster dans son esprit les annotations qu’il a déjà prises - pour redresser ton poignet, ton bras, ton dos et le reste de ton corps. Qui sait si ce sera agréable à court terme, mais à long terme le but est là : te permettre de ne pas développer une scoliose précoce.
“Je ne sais pas si vous avez déjà vu ce que faisaient les no-mags de ce côté-là. C'est plutôt fascinant.”
“Oh, les non-mag’ sont plein de bonnes idées, à n’en point douter. J’avoue que je m’intéresse quelque peu à leurs mécanismes de montres ou d’horlogerie. La précision dans leurs machines est fascinante, et redoutable. Savais-tu que certains artisans se spécialisent dans les montres tout en bois ?”
Il pourrait en parler des heures durant, tant il trouve ces objets tout bonnement fascinants. Malheureusement, l’heure n’est pas à l’extase.
“Laisse-moi te montrer quelque chose.”
Il part un instant dans la partie baguette de sa boutique - quelques baguettes en exposition, d’autres sous boîtes triangulaires, pas un nombre aussi incroyable que dans une boutique uniquement spécialisée dans les baguettes, mais tout de même un petit stock tout à fait respectable. Il se saisit d’une boîte : bois de ficus reflexa, corne d’Éruptif pour quelques 25.4cm.
Il revient vers toi, comme pour te la présenter.
“En vérité, Yve, il n’y a pas vraiment de sortilège qui permet de faire le lien entre une baguette et son sorcier : c’est un lien qui se crée instantanément après leur rencontre, et il n’est ni infini, ni indélébile. Il peut faiblir, voire se briser. Les baguettes sont des objets magiques capricieux.”
Comme pour te le prouver, il se saisit de cette baguette qui n’est pas la sienne - quand bien même il l’a sculptée. A son contact, elle se met à crachoter une fumée noirâtre et à émettre un bruit de pétard en fin de vie. Il la repose dans son socle et referme la boîte.
“C’est un processus qui se fait tout au long de la fabrication de l’objet, et qui s’accentue lorsqu’on lui offre ses caractéristiques. J’ignore si je pourrais reproduire parfaitement ceci avec ta béquille - elle n’a pas pour vocation de se comporter comme une baguette, ni d’avoir la même fonction.”
Il va ranger cette baguette à sa place initiale.
“Néanmoins, je peux essayer. Le mieux serait que je puisse jeter un œil sur ta baguette, afin de reproduire les mêmes caractéristiques.”
IRL
INRP
STATS
Louis et Yve
Jeunesse des Ans Chantés
« Oui. Bien sûr. »Affirma Yve en tendant ses plans à Louis. Il ne savait pas que Louis ne parlait que français ; en Belgique, le flamand était appris aux élèves wallons dès le plus jeune âge. Il en était de même pour les élèves néerlandophones. Si Yve comprenait et communiquait bien en français, son accent donnait un caractère rugueux à ses échanges. Son mauvais caractère jouait aussi en sa défaveur. Mais avec Louis, ça allait. Quand Yve était intéressé par un sujet, ou par quelqu'un, il levait le pied sur ses sarcasmes et ses remarques acerbes. Malheureusement, sa professeure de botanique, Ambroise n'avait pas eu cette chance. Peut-être était-elle trop jeune à son goût, et méritait-elle — inconsciemment — de se faire mecplisquer son propre cours.
« Tout en bois ? Répéta le jeune homme en levant le menton vers Louis. Il roula une épaule qu'il massa d'une main distraite. Même le mécanisme ? »
Sans le savoir, Louis venait de le lancer sur un énième sujet, qui finirait par prendre la poussière dans un coin de son esprit. Non pas qu'il finissait par s'en désintéresser, mais sa curiosité le poussait dans tous les sens. Surtout lorsqu'il s'agissait de la technologie humaine. Et il était content que Louis n'en fût pas réfractaire — au contraire d'Ambroise, justement.
« Ah. Ce... »
Quand Louis lui parla de baguette, de lien entre son sorcier et elle, Yve se contint. Il ravala ce qu'il allait dire, plutôt que d'assumer que ce n'était pas le propos. En vérité, il était déjà au courant de tout cela. Mais il ne voulait pas avouer à Louis qu'on risquait de s'amuser à lui voler sa canne. Malgré tout, il se rapprocha pour voir la baguette que l'artisan lui montra, et il lui tendit la sienne. Elle était en noyer, sans fioriture. Une vingtaine de centimètres. Quelque chose de plutôt banal, en vérité. :
« Ce n'est pas vraiment ce que je voulais dire, je sais tout ça, il haussa les épaules. Par exemple, celle-ci, il tapota le sol avec sa canne, est pensée pour moi. Je l'ai changé, amélioré au fil des années. Elle m'évite de tomber, par exemple si on me bouscule. L'enfer des transports en commun, des cris de bébés et des vieux avec leurs caddies. Des remarques qu'il était jeune, et malgré son handicap, il pouvait faire l'effort de rester debout. C'était toujours pareil avec les bipèdes : faire des efforts. Constamment. Comme s'il devait justifier de son handicap, rattraper ce qu'il ne lui permettait pas de faire. Si elle est liée à moi, d'une façon ou d'une autre, cela signifie que si on me la vole, elle reviendra à moi. Pareil, si on essaye de l'abîmer. C'est ce que j'ai fait pour ma canne, dont il jouait avec le pommeau, distraitement. Elle a aussi un sort de protection. »
Yve sourit en coin, un peu fatigué.
IRL
INRP
STATS
Louis Dhossou
Jeunesse des Ans Chantés
Yve & Louis
“Tout en bois ? Même le mécanisme ?”
“J’ai entendu parler d’un appareil qu’ils appellent “pile”. Apparemment, ça aide à faire fonctionner l’engin sans magie… Je t’avoue que j’adorerais voir la taille de la “pile” qu’ils mettent dans leurs voitures !”
Sa femme lui avait bien expliqué qu’il s’agissait d’un moteur - seulement Louis n’a pas compris la chose ainsi. Dans son esprit, un moteur n’est rien d’autre qu’une grosse pile, destinée aux voitures - et rechargeable, qui plus est. La fonction est la même, n’est-ce pas ?
Créer du mouvement.
Les non-mag’ sont fascinants.
“Peut-être devrais-je penser à alimenter mon fond de commerce avec des montres, qu’en penses-tu ?”
C’est une idée qui fera bien de trotter dans le fond de son esprit. Il apprécie les petits mécanismes, ingénieux et précis, malgré sa taille et ses manières qui pourraient si aisément laisser penser l’inverse. Louis est un homme minutieux, et infiniment précautionneux. Il a tant l’amour de l’art que de l’artisanat - de l’objet que de la manière de faire. Son esprit s’intéresse à tout, un tant soit peu que le sujet capte son intérêt.
“Ce n'est pas vraiment ce que je voulais dire, je sais tout ça.”
Il hausse un sourcil, bras croisés.
Son laïus sur les baguettes était donc si inutile ?
Il se saisit tout de même de ta baguette, pour l’examiner. Du noyer en guise de bois, patte de hibou en guise de cœur. Ça ne l’étonne pas tant : il s’agit d’ingrédients qui choisissent des innovateurs.
“Par exemple, celle-ci est pensée pour moi. Je l'ai changé, amélioré au fil des années. Elle m'évite de tomber, par exemple si on me bouscule. Si elle est liée à moi, d'une façon ou d'une autre, cela signifie que si on me la vole, elle reviendra à moi. Pareil, si on essaye de l'abîmer. C'est ce que j'ai fait pour ma canne.”
“Eh bien, je pourrais toujours essayer de produire quelque chose dans ce genre-là.”
Il te rend ta baguette, après quelques observations et nouvelles annotations sur son propre carnet de commande.
“Elle a aussi un sort de protection.”
“Je rajoute, je rajoute.”
Une commande aussi spécifique va - malheureusement pour toi - commencer à chiffrer. Louis n’est pas du genre à faire des prix d’ami. Louis n’est pas du genre à faire des prix tout court, il faut bien avouer. Il faut bien vivre, vous dira-t-il. J’ai une famille à nourrir, rajoutera-t-il. Néanmoins, il pratique toujours des prix qu’il considère comme étant justes - les matériaux, la main d’œuvre, le temps passé à l’ouvrage, ajoutez à cela la plus-value et le fait qu’il doivent bien se faire une marge.
C’est Isabella qui est plus comptable que lui, elle a toujours été douée avec les nombres. Mais il se débrouille tout de même.
“Eh bien, si c’est tout pour toi… Je pourrais te donner un délai de disons… deux semaines ? Environ, le temps que rassemble les matériaux et que je me mette à l’œuvre. Je t’enverrai un message lorsqu’elle sera prête à être récupérée, bien entendu.”
“J’ai entendu parler d’un appareil qu’ils appellent “pile”. Apparemment, ça aide à faire fonctionner l’engin sans magie… Je t’avoue que j’adorerais voir la taille de la “pile” qu’ils mettent dans leurs voitures !”
Sa femme lui avait bien expliqué qu’il s’agissait d’un moteur - seulement Louis n’a pas compris la chose ainsi. Dans son esprit, un moteur n’est rien d’autre qu’une grosse pile, destinée aux voitures - et rechargeable, qui plus est. La fonction est la même, n’est-ce pas ?
Créer du mouvement.
Les non-mag’ sont fascinants.
“Peut-être devrais-je penser à alimenter mon fond de commerce avec des montres, qu’en penses-tu ?”
C’est une idée qui fera bien de trotter dans le fond de son esprit. Il apprécie les petits mécanismes, ingénieux et précis, malgré sa taille et ses manières qui pourraient si aisément laisser penser l’inverse. Louis est un homme minutieux, et infiniment précautionneux. Il a tant l’amour de l’art que de l’artisanat - de l’objet que de la manière de faire. Son esprit s’intéresse à tout, un tant soit peu que le sujet capte son intérêt.
“Ce n'est pas vraiment ce que je voulais dire, je sais tout ça.”
Il hausse un sourcil, bras croisés.
Son laïus sur les baguettes était donc si inutile ?
Il se saisit tout de même de ta baguette, pour l’examiner. Du noyer en guise de bois, patte de hibou en guise de cœur. Ça ne l’étonne pas tant : il s’agit d’ingrédients qui choisissent des innovateurs.
“Par exemple, celle-ci est pensée pour moi. Je l'ai changé, amélioré au fil des années. Elle m'évite de tomber, par exemple si on me bouscule. Si elle est liée à moi, d'une façon ou d'une autre, cela signifie que si on me la vole, elle reviendra à moi. Pareil, si on essaye de l'abîmer. C'est ce que j'ai fait pour ma canne.”
“Eh bien, je pourrais toujours essayer de produire quelque chose dans ce genre-là.”
Il te rend ta baguette, après quelques observations et nouvelles annotations sur son propre carnet de commande.
“Elle a aussi un sort de protection.”
“Je rajoute, je rajoute.”
Une commande aussi spécifique va - malheureusement pour toi - commencer à chiffrer. Louis n’est pas du genre à faire des prix d’ami. Louis n’est pas du genre à faire des prix tout court, il faut bien avouer. Il faut bien vivre, vous dira-t-il. J’ai une famille à nourrir, rajoutera-t-il. Néanmoins, il pratique toujours des prix qu’il considère comme étant justes - les matériaux, la main d’œuvre, le temps passé à l’ouvrage, ajoutez à cela la plus-value et le fait qu’il doivent bien se faire une marge.
C’est Isabella qui est plus comptable que lui, elle a toujours été douée avec les nombres. Mais il se débrouille tout de même.
“Eh bien, si c’est tout pour toi… Je pourrais te donner un délai de disons… deux semaines ? Environ, le temps que rassemble les matériaux et que je me mette à l’œuvre. Je t’enverrai un message lorsqu’elle sera prête à être récupérée, bien entendu.”
IRL
INRP
STATS
Louis et Yve
Jeunesse des Ans Chantés
Contrairement à Louis, Yve était un peu plus aux faits de la technologie humaine. Il savait ce qu'étaient un moteur, des piles, il savait utiliser leurs transports en commun. Grâce à Jean-Pierre, il s'était habitué à vivre dans leur monde. Et par extension, il avait fait de leurs sciences un intérêt spécifique. Comme pour vivre par procuration la vie que menait son ami no-mag', espérant en secret d'en faire partie. L'école était alors venue, et avait creusé les deux univers.Et voilà où il en était maintenant.
Yve s'appuya un peu plus sur sa canne, puis il reprit sa baguette. Il examinait Louis parler, bouger, vivre ; sa carrure était bien plus impressionnante que la sienne. Il n'avait pas de complexes vis-à-vis de cela ni en comparant son corps malade aux autres plus valides. Son handicap était un fait, et il n'enviait pas les autres garçons de son âge d'être plus beaux, mieux bâti ou en meilleure santé. Ses forces se trouvaient ailleurs : sa grande tolérance à la douleur, l'intelligence vive d'un génie persuadé d'être incompris.
La douleur raidissait sa jambe pourtant, jusque dans sa hanche. C'était la faute du froid, et des postures fières qu'il prenait. Yve ne ménageait pas les autres, car il ne se ménageait pas. Et le sentiment de malaise, relié de près ou de loin à la mélancolie, lui grattait la poitrine.
Sa santé avait un prix, et c'était celui que Louis lui donnerait. Alors le jeune homme sourit, un peu plus largement. Il lui demanda :
« Pourriez-vous me faire un devis ? »
Histoire qu'il ne paye pas tout de sa poche. Ses dépenses des derniers mois étaient importantes ; l'argent n'était pas une denrée rare, il faisait partie de la classe moyenne-haute flamande. Il avait de la chance d'être né du bon côté, si ce n'était son infirmité.
« Si tout est bon de votre côté, ça l'est pour moi. Reprit Yve en relevant la tête vers Louis. Prenez votre temps, le rassura-t-il, je vous fais confiance. Son état n'allait pas se dégrader en quelques semaines, non ? Et puis, il avait trouvé un moyen de mieux gérer ses antis-douleurs. Je viendrais chercher tout ça quand vous aurez terminé. »
En attendant, Yve allait se perdre dans ses études, à élaborer de nouvelles théories entre les plantes et la musique. Ou bien, il passerait à autre chose ; en ce moment, il se posait beaucoup de questions sur les animagus. Depuis qu'il avait appris que l'assistant du professeur de soins aux créatures magiques en était un, il avait découvert un nouvel intérêt spécifique. Et heureusement pour lui, il allait bientôt pouvoir trouver des réponses à toutes ces interrogations.
« Je vous remercie, monsieur Dhossu. »
Yve n'aimait pas le small talk, il allait au bout des choses sans emprunter mille chemins. Souvent, on lui reprochait le ton sec qu'il pouvait prendre, ou son manque de tact. Cependant, face à Louis, c'était peut-être une qualité.
IRL
INRP
STATS
Louis Dhossou
Jeunesse des Ans Chantés
Yve & Louis
“Pourriez-vous me faire un devis ?”
“Bien sûr. Laisse-moi juste un instant.”
Papier et crayon, pour un tel ouvrage - heureusement qu’il a déjà les plans, songe-t-il. Il prend en compte le bois et la quantité qu’il faudra, il prend en compte le temps passé sur l’ouvrage, les sortilèges appliqués, la main-d’œuvre et finalement sa marge.
Puis il te sort un chiffre.
En francs belges et en euros.
“Je ne sais pas dans quelle monnaie tu comptes, personnellement je suis encore bloqué sur le franc. Dans le doute, je t’ai indiqué les deux, avec le taux de change actuel.”
Il te tend la feuille.
Bien qu’elle soit faite à la main et au crayon à bille, elle reste très professionnelle - avec une en-tête d’un imprimeur et une bonne qualité de papier. C’est en somme un modèle tout fait et tout prêt à être rempli. Bien pratique lorsqu’une telle demande est formulée, et ce n’est en vérité pas si rare lors de commandes spécifiques.
“Si tout est bon de votre côté, ça l'est pour moi.”
“Parfait dans ce cas.”
“Prenez votre temps, je vous fais confiance. Je viendrais chercher tout ça quand vous aurez terminé.”
“Est-ce que j’ai tes coordonnés ? Un numéro de téléphone ou une adresse pour que je puisse te joindre une fois que ce sera fini ?”
Évidemment, il ne risque pas de pouvoir te contacter par l’opération du Saint-Esprit.
“Je vous remercie, monsieur Dhossu.”
“Tout le plaisir est pour moi, Yve. A la prochaine.”
La porte se referme derrière toi, une fois que tu fus sorti. Une fois fait, Louis repart à son comptoir, range ton dossier et ta commande dans une sous-pochette spécifique. Il note également dans son carnet ton nom et prénom, ainsi que la date approximative qu’il a pu te fournir.
Deux semaines pour tout finir.
“Bien sûr. Laisse-moi juste un instant.”
Papier et crayon, pour un tel ouvrage - heureusement qu’il a déjà les plans, songe-t-il. Il prend en compte le bois et la quantité qu’il faudra, il prend en compte le temps passé sur l’ouvrage, les sortilèges appliqués, la main-d’œuvre et finalement sa marge.
Puis il te sort un chiffre.
En francs belges et en euros.
“Je ne sais pas dans quelle monnaie tu comptes, personnellement je suis encore bloqué sur le franc. Dans le doute, je t’ai indiqué les deux, avec le taux de change actuel.”
Il te tend la feuille.
Bien qu’elle soit faite à la main et au crayon à bille, elle reste très professionnelle - avec une en-tête d’un imprimeur et une bonne qualité de papier. C’est en somme un modèle tout fait et tout prêt à être rempli. Bien pratique lorsqu’une telle demande est formulée, et ce n’est en vérité pas si rare lors de commandes spécifiques.
“Si tout est bon de votre côté, ça l'est pour moi.”
“Parfait dans ce cas.”
“Prenez votre temps, je vous fais confiance. Je viendrais chercher tout ça quand vous aurez terminé.”
“Est-ce que j’ai tes coordonnés ? Un numéro de téléphone ou une adresse pour que je puisse te joindre une fois que ce sera fini ?”
Évidemment, il ne risque pas de pouvoir te contacter par l’opération du Saint-Esprit.
“Je vous remercie, monsieur Dhossu.”
“Tout le plaisir est pour moi, Yve. A la prochaine.”
La porte se referme derrière toi, une fois que tu fus sorti. Une fois fait, Louis repart à son comptoir, range ton dossier et ta commande dans une sous-pochette spécifique. Il note également dans son carnet ton nom et prénom, ainsi que la date approximative qu’il a pu te fournir.
Deux semaines pour tout finir.
IRL
INRP
STATS
Louis et Yve
Jeunesse des Ans Chantés
Les gens ne voyaient en lui que son handicap ; il existait dans leur réalité à travers sa jambe blessée, et sa canne. Sans celle-ci, il aurait pu avoir une autre image. Les valides ne retenaient que sa santé, son allure frêle, même chez lui. Ses parents le traitaient différemment de ses frères ; quoiqu'il avait fini par s'en habituer, force était de constater que c'était blessant. L'infantilisation résultant de l'annonce de son diagnostic le fatiguait plus que de mesure. Non, ce n'était pas d'être ménage dont il avait besoin. C'était d'adaptation à ce qu'il avait, ce qu'il deviendrait bientôt. Ce n'était pas des herbes magiques qui allaient le guérir, ni de se « forcer » à ne pas utiliser une béquille. Il voyait bien comment ses parents avaient peur qu'un jour, il ne soit plus en mesure de marcher.Lui, il s'était fait à cette idée depuis longtemps.
Il ne pouvait que repousser l'échéance, mais il commençait à faire le deuil. De toute façon, son enfance et son adolescence ne seraient jamais celles d'un autre.
Même chez les sorciers, sa condition était anormale.
Dans tous les cas, Yve attendit avec une impatience modérée les résultats de Louis. Entre-temps, il avait élaboré quelques nouvelles potions. Des antis-douleurs capables de supporter la douleur, et de l'aider. En vérité, son état dépendait de la qualité de son sommeil. Si la nuit avait été trop brève, morcelée entre plusieurs réveils et rêves étranges, il avait mal partout. Son humeur en dégringolait. Néanmoins, quand il revint vers Louis, ça allait. Le soir où il avait reçu la lettre, il s'était cru à la place des gamins qui attendaient le Père Noël. Son esprit inventif rendait cette réalité plus supportable.
Si bien qu'Yve se présenta tôt à la boutique de l'artisan. Une main dans la poche, l'autre serré sur sa vieille canne. Caché plus ou moins sous son écharpe, Yve rentra dans la boutique. Si tôt peu après l'ouverture, le jeune homme savait qu'il y aurait pu de monde, et qu'il serait tranquille.
Une fois à l'intérieur, il fit glisser un bout de son écharpe par le bas. Ses joues étaient rouges de froids, ses cheveux partaient dans tous les sens. Yve semblait être tombé du lit. Pour une fois. Il retint un bâillement, avant de regarder autour de lui. Il marcha un peu, de son pas claudicant. L'odeur de son Axe collé à sa peau, Yve respirait celle du bois et réprimait l'envie de toucher à tout. Il restait curieux par le travail de Louis, il se posait des questions sur la texture des objets ou de leurs aspérités. Il leva la main vers un présentoir, avant de s'arrêter et de la ranger dans sa poche.
Il soupira alors, avant de s'arrêter au milieu de la boutique. Appuyé sur sa canne, tranquille.
En apparence.
IRL
INRP
STATS
Louis Dhossou
Jeunesse des Ans Chantés
Yve & Louis
C’est un travail qui lui avait tout de même pris quelques semaines - deux pour être exact. Le temps de trouver le bois qu’il faut, de le travailler, de le sculpter, de l’enchanter. Il avait gardé l’aspect naturel du bois, élégant et sobre, tout ce qui fait en somme la beauté d’un tel matériau - il avait utilisé du noyer, comme ta baguette, à la différence près qu’il s’agissait là d’une variété de noyer provenant d’Afrique de l’Ouest.
Mais ce n’était que l’aspect extérieur de l’œuvre.
Car comme promis il y avait eu plusieurs ajouts.
Le coude est bien dévissable en premier lieu, ouvrant sur un coffre sans fond créé à partir d’un sortilège d’extension. Toute cette zone, où s’appuie le bras, peut également se courber, articulée pour s’adapter à ta posture et à la forme de ton bras. La poigne et le coude rembourrés de cuir pour plus de confort, la hauteur réglable. Tout est fait pour que tu puisses l’appréhender comme bon te semble. Les quelques sortilèges demandés ont été ajoutés bien évidemment - protection, maintien, autonomie.
Il est désormais sur une autre commande, lorsque ce matin la porte tinte de sa petite clochette. Depuis son atelier, il se dirige donc vers le magasin, les mains gantées de cuir et une forte odeur de sciure sur son tablier.
“Ah, Yve ! Bien le bonjour.”
Il lève un doigt, l’air de te demander quelques secondes supplémentaires dans ton attente, afin qu’il puisse aller chercher ta commande. Il se dirige un moment seulement dans l’arrière-boutique pour récupérer - mains toujours gantées - la béquille qu’il aura sculptée.
Il revient alors te la remettre entre les mains.
De tortue le processus, il n’aura pas posé sa peau nue sur le bois.
“Et voici… J’ai essayé de faire en sorte qu’elle se lie à la première personne qu’elle touche - pas moi, donc.”
Il te montre ses mains gantées.
“Je t’en prie, essaie-la.”
Mais ce n’était que l’aspect extérieur de l’œuvre.
Car comme promis il y avait eu plusieurs ajouts.
Le coude est bien dévissable en premier lieu, ouvrant sur un coffre sans fond créé à partir d’un sortilège d’extension. Toute cette zone, où s’appuie le bras, peut également se courber, articulée pour s’adapter à ta posture et à la forme de ton bras. La poigne et le coude rembourrés de cuir pour plus de confort, la hauteur réglable. Tout est fait pour que tu puisses l’appréhender comme bon te semble. Les quelques sortilèges demandés ont été ajoutés bien évidemment - protection, maintien, autonomie.
Il est désormais sur une autre commande, lorsque ce matin la porte tinte de sa petite clochette. Depuis son atelier, il se dirige donc vers le magasin, les mains gantées de cuir et une forte odeur de sciure sur son tablier.
“Ah, Yve ! Bien le bonjour.”
Il lève un doigt, l’air de te demander quelques secondes supplémentaires dans ton attente, afin qu’il puisse aller chercher ta commande. Il se dirige un moment seulement dans l’arrière-boutique pour récupérer - mains toujours gantées - la béquille qu’il aura sculptée.
Il revient alors te la remettre entre les mains.
De tortue le processus, il n’aura pas posé sa peau nue sur le bois.
“Et voici… J’ai essayé de faire en sorte qu’elle se lie à la première personne qu’elle touche - pas moi, donc.”
Il te montre ses mains gantées.
“Je t’en prie, essaie-la.”
IRL
INRP
STATS
Louis et Yve
Jeunesse des Ans Chantés
On y était.Yve avala sa salive, le regard un peu perdu dans ses pensées. Il ressentait une forme d'appréhension, maintenant qu'il voyait Louis lui ramenait la béquille. Il avait hâte, tout en ayant conscience qu'il marchait vers une nouvelle étape de sa vie. Il ne pourrait pas s'améliorer, et contrairement à ce que sa famille pensait, se forcer à marcher ou courir sans n'allait jamais améliorer son état. Le jeune homme pouvait qu'accepter les nouvelles réalités. Un jour, il ne marcherait plus.
C'était plus simple ainsi. Quand on se préparait à pire, qui se dessinait dans son avenir, il n'avait pas de mauvaises surprises. Il avait supporté la nouvelle, comme il supporterait le poids des regards de ses camarades sur lui. Alors le jeune homme sourit un peu plus franchement à Louis. Il hocha la tête, avant de poser sa canne contre le comptoir. Il marcha sans, et sans afficher la lassitude dans ses épaules, dans ses hanches.
« C'est amusant, lâcha le jeune homme, à vous entendre, on dirait Excalibur. Je ne sais pas si vous connaissez ? Il releva ses yeux sur Louis, avant de saisir la béquille. Ses doigts se fermèrent autour de son poignet, tandis qu'il ajoutait : c'est une légende que les no-mags aiment particulièrement. Une épée que seul son véritable propriétaire peut arracher de son rocher. Les chevaliers, les uns après les autres, s'y essayent sans arriver à la faire bouger. Puis quand son roi arrive, il la retire sans mal. »
Yve soupira, ses épaules se détendirent. Il sentait dans ses doigts le lien qui se formait, il appréciait le temps que Louis avait pris en prenant en compte ses exigences, ses besoins. C'était presque poétique pour un artisan comme le grand homme noir de porter des gants, afin de permettre à Yve d'être l'âme soeur de la béquille. Il vérifia d'abord, il l'inspecta, s'intéressa au mécanisme. Puis à la qualité du bois qu'il rencontra avec le bout de ses extrémités ; il avait les doigts fins et longs, d'une délicatesse qui lui allait plutôt bien. Après tout, Yve était fait d'os et de cheveux épais. Enfin, il l'essaya en tant que tel. Son poids se déplaça sur la béquille, son épaule s'orienta enfin dans le bon sens. À force de douleur, sa marche s'était détourée et son bassin désaxé. Mais là, tout semblait rentrer dans l'ordre.
« C'est parfait, merci. »
Il avait des questions, une curiosité naturelle qui rendait dans ses yeux un peu de vivacité. Mais il respectait les secrets de Louis, alors il se retenait. Il l'appréciait suffisamment pour prendre en compte tout cela. Le jeune homme sourit en fixant Louis, avant de se redresser et de laisser son sac tomber au sol. Sans rien ajouter de plus, Yve regarda sa canne, puis sa nouvelle béquille. Maintenant, c'était évident qu'il ne serait jamais un garçon comme les autres.
IRL
INRP
STATS
Louis Dhossou
Jeunesse des Ans Chantés
Yve & Louis
Il y avait quelque chose de fascinant, que dans la manière que tu as de te déplacer, et d’enserrer lentement tes doigts autour de la béquille - comme si tu hésitais, mais étrangement Louis se doute que ce n’est pas vraiment ça, ce sentiment qui t’anime. Il ne saurait dire le mot, en revanche.
“C'est amusant, à vous entendre, on dirait Excalibur. Je ne sais pas si vous connaissez ?”
“Oh, très peu pour tout t’avouer.”
“C'est une légende que les no-mags aiment particulièrement. Une épée que seul son véritable propriétaire peut arracher de son rocher. Les chevaliers, les uns après les autres, s'y essayent sans arriver à la faire bouger. Puis quand son roi arrive, il la retire sans mal.”
“Eh bien… Considère que ce sera la même chose alors : une fois le lien formé, toi seul pourra l’utiliser.”
Tu t’en saisis alors.
Laisse tes doigts s’enrouler autour du bois, le lien se créer doucement entre l’objet et toi. Parfois, ce pourrait être douloureux pour l’artisan, que de voir l’une de ses créations partir - c’est comme s’il y mettait une partie de son âme et qu’on la lui arrachait. Mais il sait que c’est pour le mieux, pour lui, pour les personnes qui en bénéficient. Les œuvres de Louis ne sont pas anodines, celle-ci pas plus qu’une autre et les autres pas plus que celle-ci.
“C’est parfait, merci.”
“Ravi de l’entendre !”
Il retourne derrière son comptoir, un instant.
“N’hésite pas si au fil des jours, quelque chose te gêne. Une retouche ou quoi que ce soit : c’est compris dans la prestation.”
Il ne voudrait tout de même pas que ses clients soient mécontents, après tout.
“Comme promis donc, en plus de l’ouvrage en tant que tel, j’ai apposé un enchantement d’extension dans le coffre au niveau du coude, un enchantement de protection et un autre de maintien. Le tout est articulé. Pour l’entretien : un coup de chiffon microfibre sec, puis de l’huile de lin pour le nourrir ; du cirage pour le cuir - je te fais cadeau des produits.”
Il te prépare le tout dans un petit sachet en lin - des échantillons en vérité, car sous le coup de cette gentillesse commerciale, Louis espère bien que tes prochains achats en produits d’entretien se feront chez-lui.
“Tu avais d’autres questions ?”
“C'est amusant, à vous entendre, on dirait Excalibur. Je ne sais pas si vous connaissez ?”
“Oh, très peu pour tout t’avouer.”
“C'est une légende que les no-mags aiment particulièrement. Une épée que seul son véritable propriétaire peut arracher de son rocher. Les chevaliers, les uns après les autres, s'y essayent sans arriver à la faire bouger. Puis quand son roi arrive, il la retire sans mal.”
“Eh bien… Considère que ce sera la même chose alors : une fois le lien formé, toi seul pourra l’utiliser.”
Tu t’en saisis alors.
Laisse tes doigts s’enrouler autour du bois, le lien se créer doucement entre l’objet et toi. Parfois, ce pourrait être douloureux pour l’artisan, que de voir l’une de ses créations partir - c’est comme s’il y mettait une partie de son âme et qu’on la lui arrachait. Mais il sait que c’est pour le mieux, pour lui, pour les personnes qui en bénéficient. Les œuvres de Louis ne sont pas anodines, celle-ci pas plus qu’une autre et les autres pas plus que celle-ci.
“C’est parfait, merci.”
“Ravi de l’entendre !”
Il retourne derrière son comptoir, un instant.
“N’hésite pas si au fil des jours, quelque chose te gêne. Une retouche ou quoi que ce soit : c’est compris dans la prestation.”
Il ne voudrait tout de même pas que ses clients soient mécontents, après tout.
“Comme promis donc, en plus de l’ouvrage en tant que tel, j’ai apposé un enchantement d’extension dans le coffre au niveau du coude, un enchantement de protection et un autre de maintien. Le tout est articulé. Pour l’entretien : un coup de chiffon microfibre sec, puis de l’huile de lin pour le nourrir ; du cirage pour le cuir - je te fais cadeau des produits.”
Il te prépare le tout dans un petit sachet en lin - des échantillons en vérité, car sous le coup de cette gentillesse commerciale, Louis espère bien que tes prochains achats en produits d’entretien se feront chez-lui.
“Tu avais d’autres questions ?”
IRL
INRP
STATS
Louis et Yve
Jeunesse des Ans Chantés
L'une des choses qu'Yve appréciait, en secret, dans le caractère massif de Louis tenait en un seul détail. Si sa taille était impressionnante, si sa carrure lui faisait se sentir encore comme un enfant - alors qu'il était lui-même loin d'être petit -, Louis ne le traitait pas comme une créature fragile qui méritait une attention particulière. Son esprit commercial s'arrêtait aux besoins que son handicap demandait, et c'était très bien ainsi.Alors Yve se sentit libre un peu, de ne pas surcompenser sur sa jambe valide pour se sentir confortable. Dans sa peau blême, et dans ses os pointus, jusqu'à appuyer son coude contre la béquille. Il se redressa progressivement, une fois qu'il sembla valider mentalement. Là, plus ou moins droit, le poids de son corps sur sa jambe valide, il inspecta la béquille en tant que telle. Des questions lui faisaient froncer les sourcils, sa voix répondait d'un « hm hm », alors qu'il laissait ses doigts descendre le long du manche.
Ses yeux se raccrochèrent à Louis, quand celui-ci lui détailla sa prestation. Le jeune homme hocha la tête, une fois, deux fois, il eut un bref sourire à la mention des produits d'entretien qu'il lui remettait. Bien sûr, oui. Il n'était pas naïf en pensant que ce cadeau était sans arrière-pensée, mais cela restait un geste commercial qu'il appréciait.
« C'est noté, merci Monsieur Dhossou, de son accent qui roulait le long de sa gorge. Yve attrapa sa baguette magique, puis il la pointa en direction de sa canne pour la faire changer de taille. Il la rangea ensuite dans son sac avec les échantillons des produits. Il se racla la gorge, avant de jeter son sac sur son épaule. Je pense que tout est bon de mon côté. Encore merci pour la qualité de votre travail. »
Oui. Yve pourrait faire éloge sur éloge sur le travail de Louis. Il aurait pu. Mais il n'avait pas assez d'amis pour en parler, et il n'avait pas envie d'aborder le sujet avec sa famille. Bien sûr, si on lui posait des questions sur sa béquille, il y répondrait volontiers. Mais pour être un bon ambassadeur et faire une excellente publicité, il fallait des qualités sociales qu'il n'avait pas. Du moins, qu'il ne prenait pas le temps d'avoir. Le jeune homme leva la main vers Louis en signe de salutation.
IRL
INRP
STATS
Louis Dhossou
Jeunesse des Ans Chantés
Yve & Louis
“C'est noté, merci Monsieur Dhossou.”
“Mais c’est tout naturel.”
Il est repassé derrière son comptoir tout de bois, à sortir son livret de compte. Il a entre les pages un tableau et la commande, le prix à payer et la date de paiement - aujourd’hui, évidemment. Il vérifie que tu n’aies donné aucune avance, ajoute les quelques produits offerts afin de ne pas être surpris lors de son futur inventaire.
“Je pense que tout est bon de mon côté. Encore merci pour la qualité de votre travail.”
“Merci à toi pour ta confiance.”
Tu as déjà rangé tes quelques affaires, et mis ton sac sur le dos. Louis te regarde, dans une posture légèrement plus naturelle - pas peu fier du travail accompli, pour ne rien cacher. Il souffle alors par le nez, et fait glisser son doigt sur les pages de son tableau de commande, pour t'annoncer le prix demandé.
L’ouvrage en lui-même, et les quelques ajouts de sortilèges, sans oublier le coffre et l’articulation - ça chiffre un peu. Mais Louis pratique toujours des prix justes - corrects. Il n’a pas le choix, il faut avouer, s’il ne veut pas trop souffrir de la concurrence. Et il faut bien qu’il prenne sa marge, pour payer le local et les taxes, sa propre famille également et se verser un salaire correct.
Le paiement effectué, il te laisse repartir.
“Et n’hésite pas en cas de problème. Ou si tu as une autre commande à passer, ça a été un plaisir de travailler sur celle-ci.”
Réellement. Intéressant et intellectuellement stimulant.
A la réflexion, peut-être devrait-il se lancer dans les montres ?
“Mais c’est tout naturel.”
Il est repassé derrière son comptoir tout de bois, à sortir son livret de compte. Il a entre les pages un tableau et la commande, le prix à payer et la date de paiement - aujourd’hui, évidemment. Il vérifie que tu n’aies donné aucune avance, ajoute les quelques produits offerts afin de ne pas être surpris lors de son futur inventaire.
“Je pense que tout est bon de mon côté. Encore merci pour la qualité de votre travail.”
“Merci à toi pour ta confiance.”
Tu as déjà rangé tes quelques affaires, et mis ton sac sur le dos. Louis te regarde, dans une posture légèrement plus naturelle - pas peu fier du travail accompli, pour ne rien cacher. Il souffle alors par le nez, et fait glisser son doigt sur les pages de son tableau de commande, pour t'annoncer le prix demandé.
L’ouvrage en lui-même, et les quelques ajouts de sortilèges, sans oublier le coffre et l’articulation - ça chiffre un peu. Mais Louis pratique toujours des prix justes - corrects. Il n’a pas le choix, il faut avouer, s’il ne veut pas trop souffrir de la concurrence. Et il faut bien qu’il prenne sa marge, pour payer le local et les taxes, sa propre famille également et se verser un salaire correct.
Le paiement effectué, il te laisse repartir.
“Et n’hésite pas en cas de problème. Ou si tu as une autre commande à passer, ça a été un plaisir de travailler sur celle-ci.”
Réellement. Intéressant et intellectuellement stimulant.
A la réflexion, peut-être devrait-il se lancer dans les montres ?
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